Outrage sexiste, usage de la drogue du violeur, voyeurisme ou encore viols et agressions sexuelles sur mineur… une circulaire du 3 septembre 2018 apporte des précisions sur la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, notamment sur les nouvelles infractions.
Allongement du délai de prescription
Le délai de prescription de certains crimes violents ou de nature sexuelle commis sur des mineurs est porté de 20 à 30 ans à compter de la majorité de la victime. Cet allongement permettra de donner aux victimes le temps nécessaire à la dénonciation des faits, et prend notamment en compte le phénomène de l’amnésie traumatique.
Viols et agressions sexuelles commis sur des mineurs
Lorsque les faits sont commis sur un mineur, la contrainte morale ou la surprise qui caractérisent les agressions sexuelles peuvent résulter de la différence d’âge existant entre la victime et l’auteur des faits ainsi que de l’autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur elle. Une différence d’âge importante entre l’auteur majeur et la victime pourra, à elle seule, être retenue comme permettant d’établir la contrainte ou la surprise caractérisées par l’abus de la vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes.
Ainsi, le fait qu’un mineur de moins de 15 ans puisse avoir l’apparence physique ou le comportement d’un mineur plus âgé ou d’un adulte ne doit pas conduire à considérer que ce mineur peut consentir à un acte sexuel, s’il ne dispose pas d’un discernement suffisant à cette fin.
Le fait que le mineur ait été préalablement exposé à des images pornographiques sur des sites internet ne saurait être confondu avec l’existence d’un discernement suffisant pour consentir à une relation sexuelle, une telle exposition pouvant au contraire mettre en évidence chez un jeune enfant sa vulnérabilité et son incapacité à s’opposer à de tels actes.
Par ailleurs, le crime de viol s’applique dorénavant non seulement en cas de pénétration commise sur la personne d’autrui, mais également lorsque l’auteur des faits a imposé à la victime de commettre sur lui-même une telle pénétration.
Création de 3 nouvelles infractions
- L’outrage sexiste
Cette infraction est définie comme le fait d’imposer à une personne tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste qui, soit porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
À la différence du harcèlement sexuel, l’exigence de répétition des faits n’est pas nécessaire. Un propos ou un comportement unique peut donc caractériser l’infraction.
Seront par exemple qualifiés d’outrages sexistes dont la preuve pourra non seulement être recueillie par témoignages mais également par l’exploitation de moyens de vidéo protection :- Des propositions sexuelles, mais également certaines attitudes non verbales telles que des gestes imitant ou suggérant un acte sexuel, des sifflements ou des bruitages obscènes ou ayant pour finalité d’interpeller la victime de manière dégradante ;
- Des commentaires dégradants sur l’attitude vestimentaire ou l’apparence physique de la victime ;
- Une poursuite insistante de la victime dans la rue.
L’infraction sera constituée qu’il s’agisse d’un lieu public tel que la rue, les transports en commun ou encore un établissement scolaire, ou d’un lieu privé, comme un espace de de travail.
L’outrage sexiste est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 4e classe (750 €).
Des circonstances aggravantes portant l’amende à celle des contraventions de la 5e classe (1 500 €) sont prévues en cas d’abus d’autorité, si la victime est un mineur de 15 ans, en cas de vulnérabilité physique ou économique particulière de la victime, si l’acte est commis en réunion, s’il est commis dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs ou dans un lieu destiné à l’accès à un moyen de transport collectif de voyageurs, s’il est commis en raison de l’orientation sexuelle, vraie ou supposée, de la victime.
Plusieurs peines complémentaires sont prévues, comme la nouvelle peine de stage de lutte contre le sexisme et de sensibilisation à l’égalité entre les femmes et les hommes.
Cette contravention peut être constatée par les agents de police judiciaire adjoints, par les agents de police municipale ou encore par les agents assermentés chargés de la police des transports.
- Le délit de voyeurisme
Ce délit permet de réprimer les personnes qui utilisent, à l’insu ou sans le consentement de la victime, miroir, téléphone portable, appareil photo, caméra, afin de regarder ou filmer les parties intimes d’une personne, dans les transports, une cabine d’essayage, des espaces sanitaires ou des toilettes publiques.
Ce délit est puni d’1 an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende. Les peines sont portées à 2 ans d’emprisonnement et à 30 000 € d’amende en cas d’abus d’autorité, si l’acte est commis sur un mineur ou sur une personne particulièrement vulnérable, en réunion, dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs ou lorsque des images ont été fixées, enregistrées ou transmises. - L’administration de substances en vue de commettre un viol ou une agression sexuelle
Est maintenant réprimé le fait d’administrer à une personne, à son insu, une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle.
Ces faits sont punis de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende, et de 7 ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende lorsqu’ils sont commis sur un mineur de 15 ans ou sur une personne particulièrement vulnérable. La tentative est également réprimée.
Extension des délits de harcèlement sexuel et de harcèlement moral
Le délit de harcèlement sexuel a été étendu aux propos ou comportements à connotation sexiste et l’exigence de répétition des actes a été précisée, afin qu’elle puisse également s’appliquer dans les cas où cette répétition est le fait de plusieurs personnes :
- Lorsque les propos ou comportements sont imposés à une même victime par plusieurs personnes, de manière concertée ou à l’instigation de l’une d’elles, alors même que chacune de ces personnes n’a pas agi de façon répétée ;
- Lorsque les propos ou comportements sont imposés à une même victime, successivement, par plusieurs personnes qui, même en l’absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.
Cette extension de la notion de répétition a principalement pour objet de réprimer les faits de « cyber-harcèlement », qui sont fréquemment commis par plusieurs personnes dont aucune n’a cependant agi de façon répétée et que l’on peut alors qualifier de « raid numérique ».
Cette extension de la notion de répétition a également été prévue pour le délit de harcèlement moral.